• wednesday, 14 february 2018—12:15

    Théorie de l’évolution: état actuel et radiation adaptative chez les pinsons des Galapagos

    Daniel Holender

    La théorie de la sélection naturelle de Darwin (1859) repose sur trois prémisses : (1) les organismes – les individus – d’une population sont variables, ils diffèrent les uns des autres par un grand nombre de traits ; (2) certains de ces traits sont héritables, donc transmissibles à la descendance ; (3) les organismes produisent plus de descendants qu’il n‘en peut survivre. En conséquence, les descendants fortuitement les mieux adaptés à un environnement changeant ont plus de chances de survivre et de se reproduire et par là de transmettre leurs avantages à leur descendance. Darwin postule que l’évolution des espèces repose sur un agent unique – la sélection naturelle – qui opère sur les individus des populations. Par un processus lent et continu de descendance avec modifications (divergences), la sélection naturelle est responsable de l’ensemble de la hiérarchie du vivant (espèces, genres, familles, ordres, classes…).
    Actuellement, la théorie de l’évolution reste au centre de l’ensemble des disciplines biologiques, mais elle est aussi l’objet d’un certain nombre de modifications. Je citerai brièvement les controverses suivantes. (1) Ne faut-il pas préférer le gène, plutôt que l’organisme comme unité de sélection naturelle ? (2) D’autres processus de sélection n’agissent-ils pas au niveau de l’espèce, voire plus haut dans la hiérarchie ? (3) Le processus de spéciation (de formation d’espèces nouvelles) est-il lent et continu ou rapide et discontinu (équilibres ponctués) ? La biologie évolutive du développement (evo-devo, gènes Hox) montre aussi qu’il ne suffit pas d’un long passage du temps, même de centaines de millions d’années, pour voir se développer des structures anatomiques complexes.
    L’essentiel de l’exposé portera sur l’étude des pinsons des Galápagos par Rosemary et Peter Grant. Il s’agit d’une étude de terrain commencée en 1973 sur Daphné Major, un îlot inhabité d’environ 0,3 km2 situé au centre de l’archipel. Les pinsons des Galápagos forment une radiation adaptative à partir d’une espèce ancestrale commune (aujourd’hui disparue) qui a colonisé les îles il y a de l’ordre de 2 à 3 millions d’années. Il en existe une quinzaine d’espèces endémiques dont une à l’île Cocos. Les oiseaux des différentes espèces se distinguent par leur taille et leur plumage mais surtout par la forme et la taille de leur bec (qui sont corrélées à leur type d’alimentation). A l’échelle humaine, on n’a jamais observé l’apparition d’espèces nouvelles. Mais l’étude longitudinale sur plus de 40 ans permet d’observer comment les variations phénotypiques et génotypiques interagissent avec les variations de l’environnement. On peut en conclure que le processus de sélection naturelle est continu. A une échelle temporelle aussi courte, il n’est pas directionnel, mais il n’en constitue pas moins les prémisses du phénomène de spéciation.

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